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Darc un jour, peut être un soir...

Daniel Darc, l.u.v., La Laiterie, La taille de mon âme

 

Nous n'étions pas assez nombreux mardi soir pour assister au concert de Daniel Darc à La Laiterie de Strasbourg. Initialement prévu dans la grande salle (pourtant pas énorme) le spectacle, faute de combattants fut déplacé dans "Le Club" annexe, qui pour le coup, était bondé.

Je passe sur la première partie assurée par Alan Corbel, folkeur pourtant doué. Le folk(rock) n'étant pas ma tasse de thé, il m'a laissé le temps de me mettre en condition... au bar.

L'interlude est ensuite l'occasion d'approcher de la scène. Je renonce au premier rang, largement accessible, me contentant du troisième. Je ne sais pourquoi, mais l'animal fait peur.

A juste titre, car pour un novice comme moi, l'apparition de Daniel Darc est un choc, une émotion très particulière. L'homme est meurtri, ce n'est pas une réelle surprise, mais le trouble est palpable. J'attendais le prince en exil, la déchéance esthétique; derrière ses lunettes noires qu'il ne quittera pas, est apparu un homme voûté, la démarche incertaine, aux gestes saccadés et empruntés. A cet instant, j'ai des doutes, est-ce que vous en avez ?

Pourtant, l'ouverture est limpide avec "Serai-je perdu" suivi de " C'était mieux avant", sommet extrait du sublime "La Taille de mon Ame", son dernier album. Daniel Darc psalmodie la bonne parole tel un poète maudit, tel un mutant de Marvel, il crache son poison, distille son venin... Soulagement, la voix porte, la mélodie, à peine éraflée, et les textes parfaitement compréhensibles pénètrent l'air avec une toute puissance bouleversante. Parmi les morceaux initiaux, juste avant le single du moment "C'est moi le printemps" figure "La Pluie qui tombe", chef d'oeuvre dark dans l'oeuvre de Darc : 

 

Musicalement, la force de frappe est dense. A la basse et au violoncelle, exerce d'ailleurs une vieille connaissance du public de Bashung, Jean François Assis, implacablement impeccable, comme d'hab'. A la guitare, sévit François Bodin, grisonnant mais toujours virevoltant, quand au clavier et à la batterie, n'ayant pas saisi leurs patronymes, nous dirons qu'ils sont tenus par Ray Manzarek et John Densmore (avis aux connaisseurs...).

Sur " L.U.V. " , c'est "Manzarek" qui se charge sobrement de suppléer Bashung en duo avec l'ange déchu. Évidemment, je pense à l'Apache dont l'interprétation était autrement dévastatrice. Absence...

Nous somme encore au début du concert quand Daniel Darc s'éclipse pour un long moment. Le solo de guitare s'étire, s'étiiiiire... Double absence, et grande inquiétude !

Sourire en coin, il réapparaît finalement, désaltéré mais inaltérable.

Les morceaux s'enchaînent ensuite merveilleusement avec dans le désordre: "Et quel crime" - "Sous la lune" - "J'irai au paradis" - "Je me souviens je me rappelle" - "Elegie ≠2" - "My Baby left me" - "Vers l'infini" - "La seule fille sur Terre" - " Inutile et hors d'usage" - "La main au coeur" ect... Pas une seule piquette, que des grands crus. On décèle des plaies béantes, des déchirures exaltées, des rédemptions, l'amour des âmes en peines. On survole des gouffres avides de sentiments... La faucheuse rôde parfois en special-guest, c'est une évidence, mais Darc danse avec elle depuis si longtemps. Alors...

L'impression générale est excellente, les applaudissements nourris, parfois solennels. "Ca ne sert à rien" s'accouple langoureusement avec "People are Strange" des Doors et ancre définitivement Daniel Darc pile à l'intersection de Serge Gainsbourg et d'un Jim Morisson ayant pris de la bouteille. Je me surprend ainsi à relever que l'American Poete, mort à 27 ans en 1971, continu d'influencer la scène musicale actuelle.

En guise de rappel, l'ex Taxi Girl , s'en est allé  "Chercher le Garçon". Le tube 80's claque comme jamais, rock, speedée et aérien. Cette chanson est et restera définitivement une bombe pour l'éternité. L'heure de la séparation approche et Daniel Darc aura finalement rempli son rôle à merveille. L'homme connaît le fond des abîmes, y (re)plonge régulièrement mais reste avant tout un immense artiste, largement sous-estimé. Un charisme christique, une présence intimidante au service d'un répertoire sublimé sur scène.

Une petite dernière et on se tire, nous annonce-t-il alors. "La Taille de mon Âme"...

Ton âme, Daniel, depuis mardi, nous sommes une petite centaine supplémentaire à savoir qu'elle est en peine mais qu'inversement proportionnelle à la salle de concert, sa dimension est définitivement hors norme.

 Merci

Oliver

 

 P.S: Cliché signé NSOphoto et vidéos enregistrés hier soir (05/04/12) au Trianon de Paris, mis en ligne par pinkfrenetik.com

 

 

Commentaires

  • Eh bé, j'ai bien fait d'attendre jusqu'à ce matin pour pouvoir lire ce très beau résumé tellement bien écrit tranquillement !!!
    Merci beaucoup Mister Olivier, n'ayant jamais vu Darc sur scène, j'ai un peu la sensation maintenant d'en svoir un peu plus sur ses prestations scèniques !!
    Très beau résumé et bien écrit. On y ressent bien le sentiment de l'auteur, qui a passé, un très très bon moment de concert, commencé il va de soi par un détour obligatoire et toujours mérité au bar pour chauffer les neurones !!!

    Je connais eu en fin de compte ce chanteur, mais tout ce que je connais de lui, j'aime !! Je vais guetter les dates, et si il passe vers chez moi, bingo !! Cela va faire du coup là plusieurs mois que je n'ai pas fait un bon concert voir un concert tout court !!!
    On a bien ressenti en tout cas ton ressenti à toi, et je crois que, c'est lors de ce genre de prestation forte, même si elles n'ont rien à voir avec celles de l'Apache disparu, on y pense, et que quelque part, on fait un parallèle à un moment ou à un autre !!

    Merci pour les extraits, et merci pour ce très beau récit, qui nous démontre par sa qualité que tu as encore ici-même plein plein mais alors plein de choses à livrer !!!

    Osez, Osez

  • Salut Greg,

    Oui, bien sûr, encore plein de chose à livrer, no problemo !!!

    Et, oui, j'ai vraiment passé un excellent moment. Daniel Darc sur ses trois derniers albums "Crève Coeur" - "Amours suprêmes" - "La Taille de mon Ame" représente désormais à mes yeux ce qu'il reste de mieux en France (avec Dominique A plus lyrique et plus lumineux).

    Au niveau des textes, je pense qu'il est difficile de faire poétiquement plus direct, plus efficace et plus sombre.
    Musicalement, il a su très bien s'entourer avec d'abord Frédéric Lo et maintenant Laurent Marimbert.

    Bon après, voilà, disons qu'allez voir Daniel Darc en concert, c'est exactement l'inverse que pour une prise de sang. NE SURTOUT PAS Y ALLER A JEUN !!!!

  • Merci beaucoup Oliver pour ce bon résumé qui donne vraiment envie de découvrir cet artiste.
    Je l'ai manqué moi aussi, une prochaine fois j'espère j'y serai (et une première pour moi aussi !).
    A bientôt de vous lire
    Fleur

  • Merci Fleur, je ne peux évidement que te le conseiller.

    A bientôt

  • J'ai bien ri cher Olivier l'autre jour, en lisant le "surtout n'y aller pas ajeun" !!!!

  • J'aime Daniel Darc! Je te remercie Olivier pour ce commentaire atmosphérique que m'a transporté à ce club...

  • Y'a pas de quoi, Marcella, ça me fait infiniment plaisir si j'ai vraiment réussi à te transporter jusqu'à Strasbourg grâce à mon commentaire "atmosphérique" ( la classe !).

    J'espère que Daniel Darc lira un jour, cet article et surtout ton comment'. J'imagine qu'il serait content de savoir qu'il a au moins une adepte de l'autre côté de l'atlantique...

    C'est un écorché vif aux larges séquelles mais ses lyrics sublimes méritent qu'on s'y attarde et surtout qu'on vienne les déguster sur scène.

    @+

  • Daniel Darc ... mort ...?
    J'ai lu ce nouvelle tout en écoutant "Azar" de Lacrimosa... trop triste ...

  • Repose en paix Daniel Darc

  • Parcourant ce post en ce début de soirée, je me suis régalé de ton article, et des quelques vidéos...

  • Mon petit doigt me dit que tu as récemment approfondi l'oeuvre de feu Monsieur Darc... Non ?

    Quel souvenir de concert ! Un si grand moment dans une si petite salle...

    On était loin de la ferveur du Stade de France ou de Bercy que certains artistes parviennent à remplir à grand renfort d'effets pyrotechniques, de chorégraphies millimétrées et de show laser.

    Quoi de plus émouvant que de se retrouver au milieu d'une petite centaine de privilégiés, à trois mètres d'une légende déglinguée nous livrant son âme, sans artifice à travers une poésie enivrante, pure et hautement addictive.

    Daniel Darc, comme Bashung, me manque énormément... Voici l'occasion de les revoir ensembles: http://www.youtube.com/watch?v=qkUl8Ak3Rrk
    http://www.youtube.com/watch?v=4MrKFA7nsE0

    Merci Greg pour ton comment', je me souviens, je me rappelle avoir pris un pied terrible à écrire ce petit article.

  • Y sait tout ton petit doigt...
    Bien plongé dans la profondeur parfois dark mais pas que d'un Daniel Darc très touchant, très précieux, et si tendre... J'avoue avoir écouté écouté et écouté en boucle Chapelle Sixteen que je trouve vraiment sublime, ainsi que la taille de mon âme... Notamment pendant les quelques jours et surtout nuits, consacré au lifting profond de ce site. La même chanson en boucle, la même voix, pour me transporter au travers de la nuit... Grandiose...

    Les enfants, sur Chapelle Sixteen pffffff en boucle, pendant des heures, dans le creux de la nuit, à refaire ce site, et me demander si, si, si ça allait, si ça ira... Faut croire qu'il m'a bien aidé...

  • Salut Greg,

    Jusqu'à ton dernier comment', je n'avais que très peu écouté Chapelle Sixteen.
    D'abord un peu rebuté par le côté posthume de l'album, puis par le grand dépouillement de certaines chansons piano-voix, j'avais à peine survolé les chansons au delà de la troisième piste.

    Ta dernière intervention m'a donné envie de m'y plonger vraiment.

    Sans doute fallait-il attendre le bon moment, la disposition cérébrale et émotionnelle adéquate. La plongée en eau trouble dure désormais depuis plus de deux semaines.
    Quel étrange album. Darc semble tellement vivant.
    Quelle beauté, quelle profondeur, quelle sincérité dans cette mise à nue.

    Les Enfants (en partie improvisée) est en effet grandiose tout comme Que sont devenus les hommes, La Dernière Fois, Une Place au Paradis ect...

    C'est aussi avec une grande lucidité qu'il évoque ce qui était bel et bien sa Période Bleue. Tellement touchant.

    Darc est parti en nous léguant un tube générationnel (Chercher le Garçon) et quatre albums sublimes et intemporels (Crève Coeur - Amour Suprême - La Taille de mon Ame - Chapelle Sixteen) qui figurent dans mon panthéon personnel aux côtés des meilleurs albums de Gainsbourg et Bashung.

  • Comment ne pas succomber, et surtout; comment appuyer sur stop; quant on écoute Chapelle Sixteen !
    La dernière fois en effet, Période bleue...
    Troublant, intense, profond...
    Thank you Sir !

  • En ce moment, c'est Darc en boucle, Darc le matin, le jour et la nuit... C'est assez difficile d'arrêter l'écoute de Daniel Darc, et de passer à autre chose, alors je fais attention à quel moment j'enclenche...

    En fait, j'ai eu la bonne idée d'acheter ses deux derniers albums "la taille de mon âme" et "Chapelle Sixteen" (que j'écoutais auparavant de temps à autre sur diverses plate-forme musicale) et c'est vrai, bien vrai que c'est... grandiose !!! Il y aurait beaucoup à dire, beaucoup, comme cette étrange sensation de la lumière dans la noirceur parfois !

    Les musiques, les mots, le chant, le tempo, les blancs, je trouve tout parfait, parfaitement dosé, ça prend aux tripes !

    Alors j'ai lu et relu cet article, fort bien écrit, et je me dis que, je me suis réveillé trop tard ! Ca devait pour sûr être quelque chose sur scène...

    je suis en gros manque de concert en ce moment, car quand je regard la liste des programmations... rien ne me dis ! Y'a peut-être Miossec dans quelque semaines... Maybe...

    Je suis donc totalement Darc en ce moment, et je trouve en effet ces deux albums sublimes, intense, et très touchant!

    J'ai besoin de quelqu'un qui n'a pas besoin de moi....

  • Salut Greg,

    En gros manque de concert moi aussi... A part Christophe et Dominique A, je n'ai vu personne en live depuis ce fameux concert de Daniel Darc, il y a deux ans 1/2 déjà. Et même si ces deux orfèvres ont livré des spectacles de qualité, à la fois épurés et classieux, la crasse du concert de Darc me hante toujours.
    Darc et Bashung sont toujours en moi. Paradoxalement, la noirceur d'une bonne part de leur oeuvre m'a apporté tant de lumière.
    Et que dire (sinon s'enduire de tous les crimes), de leurs prestations scéniques, loin d'être de simples spectacles. D'estrades en estrades ils déposaient leurs tripes , nous dévoilant leur âme en malaxant la notre.

    Oui, je pense qu'avec un concert de Darc tu aurais pris ton pied et une baffe dans la gueule et peut être même dansé sur un malentendu.

    J'espère qu'un jour paraîtra un album live de cette ultime tournée.

    "Crève Coeur" et "Amours Suprêmes" sont également deux très grands albums. Je les préfère encore aux deux derniers que tu cites, par ailleurs excellents.
    "Crève Coeur" est d'ailleurs, avec "L'Imprudence", le seul album à n'avoir jamais quitté l'habitacle de ma bagnole depuis sa sortie, il y a dix ans déjà. Très régulièrement, l'un comme l'autre m'accompagnent dans mes kilomètres de vie en rose et me filent des frissons vers 5h du mat' après une sale nuit de besogne.

    Sois sanctifié Daniel,

    A bientôt Greg

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